PAYS DE MALHEUR !

DE YOUNÉS AMRANI & STÉPHANE BEAUD

ÉDITIONS DE LA DÉCOUVERTE - PARIS 2004

Un jeune des cités écrit à un sociologue

Site de travail autour de la proposition de la

Cie Passeurs de Mémoires

Partenaires du projet : CO-PRODUCTIONS /Maison des Métallos (Paris) - Espace 1789 à Saint-Ouen / avec le soutien du Lycée Le Corbusier & de la ville d'Aubervilliers & de la Fondation de France



L’équipe du projet :

Céline Bothorel - chanteuse, comédienne.

Farid’O - chorégraphe

Sylvie Laporte - pianiste, comédienne

Michel Lautru - poète 

Guillaume Ledun - vidéaste

Dominique Lurcel - metteur en scène

La Compagnie PASSEURS DE MÉMOIRES est aidée par le Conseil Régional d'Ile-de-France

Description de l'image

SITE DE LA COMPAGNIE :

www.passeursdememoires.fr

POEMES EN LECTURE SIMPLE

LORS DU PREMIER STAGE À AUBERVILLIERS AU LYCEE LE CORBUSIER EN FEVRIER 2012, LES PARTICIPANTS ONT PENDANT DEUX JOURS ECRITS DES POEMES SOUS LA BIENVAILLANCE DE MICHEL LAUTRU ET DOMNIQUE LURCEL.

Au vent, ce pays de malheur !

Au vent, tous ces regards moqueurs !

J’accuse l’homme de renfermer sa rancœur

J’accuse ce troupeau de gens malveillants

Tous ces aides sociaux transparents

Tous ces conseils hypocrites contraignants

Au vent, ce pays de malheur !

                                                               Asma

 

J’accuse les grands

Ceux qui se croient grands

Les dominants

Les au-dessus des lois

 

Et moi petit

Ma seule misère

C’est de me croire mort !

Mort sans espoir

Mort, un destin de mort !

 

J’accuse la vie qui me marche dessus

Et qui m’oblige à suivre les règles de la rue

Et être dans l’ombre de la lumière

 

                                                                                   Khaled

 

J’accuse la rue qui ne m’a pas laissé au chaud

J’accuse la solitude qui m’a arraché à ma famille

J’accuse la pauvreté qui m’a infligé un manque de nourriture

J’accuse l’indifférence qui m’a poussé à l’échec

J’accuse l’absence d’espoir qui ne m’a pas appris à vivre

J’accuse le jugement qui m’a fait noir ou blanc.

 

                                                                                   Sarah 

 

Naitre invisible !

Je souhaite conquérir un monde meilleur

Je souhaite survivre à l’indifférence

Je souhaite exister et non pas faire l’objet d’une transparence

Suis-je un être dépouillé par la vie ?

Je fais référence à une froide existence.

Mon seul objectif est de pétrir l’avenir, songer à évoluer, à marquer, à renoncer à la « discrimination »

Agir, accomplir un désir froissé

Trébucher, se relever

L’espoir abandonné

Vivre est un combat

 

                                                     Ouleymatou 

 

J’en ai marre d’entendre « je n’y peux rien, je me débrouille »

Marre de cette indifférence puérile

Marre de cette mauvaise foi qui persiste jusqu’au bout de la nuit.

Regarde ta vie

Une vie sans projet

Une vie sans but

Regarde ton insouciance

Elle te tue à petit feu

Elle règne dans ta grandeur misérable

Et tu l’as consommée sans modération

Le jour qu’elle s’évapora

Trop tard

La vie est courte

Renoncer, souffrir, s’enfoncer

Que peux-tu faire d’autre 

Plonger encore plus profond que le fond du siphon

Oui, j’en ai marre

Avoir quelque chose de plus fort que l’autre

Voila la différence

Celle qui te rendra grand dans ta misère imaginaire

Un moral de fer pour une vie de merde

J’espère t’entendre dire : «Tiens bon maman »

Oublions tout

Pensons à notre avenir inachevé

Le plus important c’est d’avoir un rêve.

J’en ai marre alors bats-toi

 

                                                                       Octavie

 

 

J’ai honte d’être né sur un sol mal élevé

Mal élevé au point de nous rejeter

Rejeter au niveau de nous rabaisser

Mais où va ce monde divisé ?

J’ai honte des gens qui se sentent ignorés

Ignorés jusqu’à s’ignorer eux-mêmes

J’ai honte que l’échec soit une fatalité

Alors que ça devrait être une dualité

J’ai honte de nous vous toi

La société c’est tout le monde

Et non les gens qui ont la tête haute

Sans remarquer les hommes du bas-monde

                                                                              Sophie 

 

 

DIAPORAMA

DES DIFFERENTS ATELIERS ORGANISÉS DEPUIS LE DÉBUT DU PROJET : 

FÉVRIER 2012 AU LYCÉE LE CORBUSIER À AUBERVILLIERS - AVRIL 2012 À L'ESPACE 1789 DE ST-OUEN ET À LA MAISON DES MÉTALLOS À PARIS.

© Crédit Guillaume Ledun - L'Œil à Mémoires


Témoignages vidéos des participants, propos reccueillis & réalisation Guillaume Ledun


"Je suis en plein visionnage des interviews des participants..Et c'est un véritable coup de poing à l'estomac..Jamais je n'aurais penser que ce livre puisse à ce point "libérer" une parole, créer de tels sentiments..Au delà du livre même je trouve que ce travail que vous avez fait et que vous continuerez à faire est une chance unique pour ces jeunes de s'épanouir, de se découvrir, de s'enrichir..
Il y a eu bcp de choses positives autour de ce livre depuis sa parution..J'ai fait des rencontres dans des lycées,etc..échanger avec bcp de monde..Mais là je vous avoues que je suis sous le choc ( positivement bien sur)...
Je voulais vous féliciter pour ce travail..Et je me dis que ya vraiment matière à faire beaucoup de chose...
Je le dis souvent et ça a toujours été ma philosophie vis à vis de ce bouquin, ma personne importe peu...Le plus important ce sont les mots, les situations qui comptent..
Et là avec ce que vous avez fait, le but est atteint et même si je n'y suis pour rien, je peux vous avouer que j'en suis EXTRÊMEMENT fièr !

Merci à vous"

Younès Amrani - sept.2013



Je crains le lever du soleil tous les matins

Cette peur de six heures qui frappe à ma porte

Je le sais j’ai brisé cette chétive loi sociale de mes mains

Mais pourquoi devrais-je souffrir l’injuste glaive que la Justice porte

Moi qui survis déjà dans la prison que je m’impose

Moi qui suis déjà le bourreau de ma propre peine

Comment pourrais-je endurer la haine de cette double peine

Alors que sur moi les larmes et espoirs de mes proches se posent ?

 

                                                                                                        Samy


Honte de ces regards maladroits

Honte de cette incompréhension nuisible

J’ai honte de voir mon père pleurer du sang

J’ai honte de ne pas pouvoir sauver mon frère de ces entrailles meurtrières

Honte aux rues de la France

Honte à la misère qu’elle propage dans le cœur de ses vagabonds

Oui honte du manque d’argent, de fringues

Oui honte de ces vacances volées de ces amours évaporés

Cette honte ronge mon cœur et détruit mon esprit

Mon âme devient fade et mes pensées meurent

 

                                                                                    Octavie

 

Honte de n’pas offrir un cadeau à mon meilleur ami

C’est la vie, on est en manque d’argent quand on est petit

Honte de dire à ma famille que moi j’aurai peut-être jamais mon bac

Honte de leur dire que j’arriverai jamais à la fac

Mais c’est mieux que si je leur disais j’ai déjà touché au crack

J’ai honte d’être pas comme tout le monde

Mais y en a plein qui ressentent ces mêmes ondes

J’ai honte de vous dire que je suis dans la galère

Mais faut pas avoir honte, avoir la tête haute et ne pas se taire

Ne pas avoir honte d’exprimer son opinion

Mais avoir honte de se faire marcher dessus et baisser son chignon

Faut arrêter la téhon alors qu’on a pas de raison

 

                                                                                        Khaled



Honte de cette honte qui ronge mes entrailles

J’ai honte de ces rentrées vides de souvenirs

Honte de ces fêtes que je me dois d’embellir

Ces jours pour d’autres synonymes de joie et de flatteries

Sont pour moi des nuits de peur et d’insomnie

Parfois mes rêves me sauvent de cette odieuse tyrannie

Avant que la lumière du jour ne vienne briser cette utopie

 

                                                                                               Samy